L’Evangile en Afrique du Nord
L’apparition du christianisme dans cette région d’Afrique du Nord remonte à l’âge apostolique. Le livre des Actes fait référence à des mouvements missionnaires entre les deux rives de la Méditerranée et nous relate déjà des traces «libyennes» avec un certain Simon de Cyrène, présent à Jérusalem lors de la crucifixion de Jésus; dans ce sillage, d'autres personnages nord africains seraient au contact de l’Eglise naissante.
Communément appelés «berceau du christianisme», les pays méditerranéens restent encore aujourd’hui des plus opposés au message de l’Evangile et des plus pauvres en termes de force missionnaire. Le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, soit les «pays du Maghreb», ont pour frontière commune la Méditerranée et sont considérés comme pays francophones. Les langues pratiquées sont l’arabe, le français et différents dialectes berbères (le kabyle est une langue berbère) et la religion dominante est l’islam.
Il m’est difficile de vous parler de cette vaste région, chacun de ces pays étant unique, avec son histoire, sa multiplicité culturelle et ethnique et son système politique et religieux. Je vous parlerai donc d’une région d’Algérie, la Kabylie, que je visite régulièrement depuis plus de dix ans maintenant; elle est la partie montagneuse de cette nation algérienne.
Quelques repères historiques
Au cours des siècles, la Kabylie a connu l’ensemble des religions du bassin méditerranéen. C’est un peuple pacifique de nature et crédule en matière de croyances (à commencer par l’animisme, dont il reste des traces aujourd’hui). Les dates historiques officielles parlent des premiers chrétiens kabyles avant l’an 180 (les actes des martyrs scillistains contiennent un procès-verbal de la comparution, devant le proconsul d’Afrique, d’une dizaine de chrétiens d’une bourgade de la Kabylie en l’an 180).
Nous devons à ce peuple un héritage précieux, car il naîtra de cette terre des pères et des docteurs de l’Eglise tels que Tertullien, Cyprien, Lactance, Arnobe et Augustin. Des grands thèmes théologiques comme la trinité ou l’eschatologie seront formulés pour l’Eglise universelle à partir de leurs écrits. Les réformateurs du 16e siècle s’inspireront encore des commentaires d’Augustin. Du 2e au 4e siècle, le christianisme connaîtra un essor en Kabylie et verra la naissance de nombreuses communautés dynamiques.
Qu’en est-il aujourd’hui?
Il n’y a plus de missionnaires permanents en Algérie; il y a quelques années, le dernier d’entre eux a dû partir séance tenante après vingt-cinq années de travail très dur et sans voir de fruits visibles.
C’est dans les années 1990 que Dieu commence à toucher ce peuple par des témoignages incroyables de vies changées, de guérisons et délivrances. Le feu se répand très rapidement dans des villages isolés et dans les petites bourgades de cette région montagneuse de la Kabylie; des familles entières alors se tournent vers Jésus et l’acceptent comme Seigneur.
L’Eglise de Jésus-Christ s’organise tant bien que mal dans les maisons, dans les garages ou dans les bois. Dans le même temps, l’islam se radicalise dans tout le pays; cette jeune Eglise naissante doit vivre avec de constantes menaces politiques et religieuses, y compris la mort. Pour se réunir, les chrétiens sont obligés de redoubler de prudence, se donnant rendez-vous dans les bois ou au bord des ruisseaux. Les lieux, le jour et l’heure changent constamment, comme au temps de la Réforme en France. Malgré cette situation, l’Eglise de Kabylie a continué courageusement ces dernières années à rendre un témoignage puissant à notre Seigneur Jésus-Christ et continue de prospérer. Actuellement, certaines communautés vivent un réveil depuis plus de dix ans.
J’ai le privilège de visiter régulièrement un ami responsable d’une église dans une ville de quinze mille habitants. Il a commencé, comme souvent, dans sa maison et, au bout de quelques années, de nombreuses personnes désireuses de participer au culte devaient se contenter de le vivre à l’extérieur, sur la voie publique, ne trouvant plus de place à l’intérieur (plus de quatre-vingts personnes dans un salon de quelque quarante-cinq mètres carrés). Ce qui ne manqua pas de provoquer quelques tensions avec le voisinage. Aujourd’hui, par la grâce de Dieu, ils se rassemblent dans un bâtiment de deux étages; la salle de culte peut contenir environ deux cent cinquante personnes et, deux fois par semaine (vendredi et samedi), c’est plein! Le matin à neuf heures, les chrétiens et les non-chrétiens sont là; les enfants aussi participent avec les adultes. Ils chantent, prient, écoutent l’Evangile toute la journée… il n’est pas rare de voir ces rencontres se prolonger au-delà de seize heures. C’est l’effervescence dans l’église, et l’ordre et la paix dans le Saint-Esprit y sont manifestes.
«Dieu accomplissait par l’intermédiaire des apôtres beaucoup de prodiges et de miracles.» (Actes 2:43) Je dois dire que, lorsque je me trouve parmi eux, ce verset prend tout son sens. Au début de 2012, alors que l’église se retrouvait pour une semaine de jeûne et de prière, ses membres ont constaté à maintes reprises que, durant leurs rencontres, leurs pieds trempaient dans plusieurs centimètres d’eau, phénomène inexpliqué à ce jour. Dans les mois qui ont suivi, une nouvelle onction puissante du Saint-Esprit s’est manifestée, accompagnée de guérisons et de délivrances. Ce que vit cette église n’est pas un cas isolé. Dieu visite le peuple berbère et je prie que ce feu du témoignage de Jésus-Christ embrase tout le pays et au-delà de ses frontières. Dans d’autres endroits, les chrétiens se réunissent plus discrètement dans les maisons. Ils jouissent actuellement d’une certaine liberté, mais les choses peuvent changer très rapidement. En Libye voisine, les quelques chrétiens locaux sont vraiment cachés et les rares églises ne comptent que des expatriés.
Si vous me demandiez: «Jésus est-il à l’œuvre en Afrique du Nord?», je vous répondrais par ce passage de Luc 7:22: «Et il leur répondit: Allez rapporter à Jean ce que vous avez vu et entendu: les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent et la bonne nouvelle est annoncée aux pauvres.»
J. de France (pour des raisons de sécurité, l'auteur préfère rester anonyme)
N.d.l.r.: Un excellent livre est paru sur ce sujet, que nous vous avions présenté dans le Chaback 127: Algérie, tu es à moi! signé Dieu – Jean L. Blanc – Editions Sénevé